La programmation du Festival Lumière 2025 compte onze films d’animation pour 153 présentés. Représentatif du marché français, ce catalogue témoigne de la résistance des clichés infantilisants adossés aux dessins animés.

Au Festival Lumière 2025, le jeune public pourra bénéficier de la projection de deux longs métrages animés à la Halle Tony Garnier. Photo Erwann Thuot

Avec une avant-première, une exposition, une conférence et trois séances à la Halle Tony Garnier, le cinéma d’animation n’a jamais été aussi bien représenté au Festival Lumière. Sur les 153 films projetés, onze sont animés, soit un peu plus de 7 % de la programmation. Cette proportion est quasiment représentative du marché du cinéma français.

Le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) indique que seuls 60 œuvres animées sont sortis dans les salles françaises l’an dernier, un record. Rapportés aux 744 longs et courts-métrages distribués en France, en 2024, d’après les données du CNC, l’animation compte donc pour 8 % des films sortis en salle au pays des Lumières.

« Dans l’imaginaire collectif, l’animation, c’est pour le jeune public »

En 1973, « La Planète sauvage de René Laloux est le premier film d’animation à obtenir le prix spécial du jury du festival de Cannes », rappelle Olivier Cotte, auteur du Grand livre des techniques du cinéma d’animation (2024) et des 100 ans du cinéma d’animation (2023), parus chez Dunod.

Ce film dénote par son esthétique et son scénario. Contrairement aux productions des studios Disney, il est plus volontiers classé comme un drame de science fiction, que comme un objet de divertissement familial.

Au Festival Lumière, l’idée que l’animation reste un art grand public s’est affirmée dès sa deuxième édition. En 2010, la Halle Tony Garnier accueille la projection du film de Paul Grimault, Le Roi et l’oiseau (1980). En ce mercredi après-midi, un goûter est même offert aux spectateurs après la séance. Le festival qui peine à séduire au-delà d’un public d’initiés se présente dès lors comme « un festival de cinéma pour tous ».

Une tendance de long terme

Depuis, la programmation « animation » du Festival Lumière n’a cessé de se densifier : une avant-première des studios Ghibli en 2020, deux documentaires en 2021, le prix Lumière décerné à Tim Burton, réalisateur nommé à deux reprises pour l’Oscar du meilleur film d’animation, en 2022, une rétrospective pour le centenaire des studios Disney en 2023, sans oublier le focus sur la licence Astérix l’année dernière.

Pour cette édition 2025, l’un des premiers long-métrage d’animation de l’Histoire, Les Aventures du prince Ahmed (1926) de Lotte Reiniger, est même programmé dans la section « Sublimes moments du muet ».

Mais, le Festival Lumière présentera bien Kung Fu Panda (2008) dans sa rubrique « Le festival Lumière pour les enfants ». « Dans l’imaginaire collectif, y compris des cinéphiles, l’animation, c’est pour le jeune public », commente Jeanne Frommer, coordinatrice éditoriale du festival national du Film d’animation.

Comme Le Roi et l’oiseau, les productions animées à succès que sont Kung Fu Panda, Astérix et Obélix : Le combat des chefs (2025) et les quatre animés de la nuit Japanime seront projetées à la Halle Tony Garnier. Ces séances géantes se justifient au regard de l’audience des films d’animation. L’an dernier, trois des six long-métrages qui ont fait le plus d’entrées dans l’Hexagone sont des dessins-animés.

À gauche, le cinéma d’animation représente un tiers de la deuxième page de la programmation 2025. À droite, l’édition 2024 ne faisait pas figurer de dessin animé à l’arrière de la couverture. © Festival Lumière

S’autonomiser pour exister

Autre limite apportée par Jeanne Frommer : « Le cinéma d’animation d’auteur français a du mal à exister sans les grands noms du cinéma en prise de vue réelle. » En ligne de mire, Arco (2025) d’Ugo Bienvenu, présenté en avant-première, dont une productrice associée s’appelle Natalie Portman, invitée d’honneur du Festival Lumière.

Le changement de mentalité viendra peut-être des nouvelles générations. « De plus en plus d’ados et d’adultes ont grandi avec les animés japonais », souligne la coordinatrice du Festival du film d’animation. D’ailleurs, que ce soit pour la venue d’Alain Chabat ou pour la nuit Japanime, le jeune public n’est pas explicitement ciblé. L’animé Belladonna (1973) de Eiichi Yamamoto est même interdit au moins de 12 ans.

De son côté, Yann Chamier, responsable pédagogique du cursus « Animation & Illustration » à Bellecour École incite ses étudiants à « casser les cloisons » en s’ouvrant au cinéma en prise de vue réelle. Selon lui, les festivals, spécialisés ou généralistes, restent une occasion parfaite pour « se constituer un bagage culturel et artistique ».

Contacté par mail, le Festival Lumière n’a pas répondu à nos questions au sujet de la programmation 2025.

  • Erwann Thuot

    Erwann voulait devenir secrétaire, comme sa grand-mère. Désormais, c’est pour L’Écornifleur qu’il cultive son goût pour la police… d’écriture Arial Narrow et les stylos de couleurs. Depuis qu’il a découvert l’intermittence et l’Eurovision, il consacre son énergie à l’écriture de chansons, de podcast ou d’interviews pour la télévision.