Écully, Bron, Corbas, Sainte-Foy-lès-Lyon : le Festival Lumière délocalise dans 21 salles des séances de ses différentes sélections. L’Écornifleur s’est rendu dans deux de ces salles « péri-phériques » de la Métropole voir si l’ambiance du Festival était au rendez-vous !

Le Festival Lumière ne s’appelle pas vraiment Festival Lumière… Dites plutôt « Grand Lyon Film Festival ». Ce naming institutionnel est issu du partenariat avec la collectivité publique qui réunit 59 communes autour de Lyon. Le cœur du festival bat à la Villa Lumière, mais 29 séances sont organisées dans 21 cinémas métropolitains.

A Écully, ce lundi après-midi, les portes de l’espace culturel sont ouvertes. Au bord de la route de Champagne, l’affiche du Festival trône et annonce les deux séances du jour : celle de 17 heures avec Sunset Boulevard, film réalisé en 1951 par Billy Wilder, et celles de 20 heures avec Nos plus belles années de Sydney Pollack. La première sera présentée à un petit public. Une trentaine de places ont été vendues, dans une salle qui en comptent 142. La projection du soir affiche, elle, presque complet. La dizaine de places qui seront vendues à l’entrée « trouveront sans doute preneurs », pense Christophe Moussé, directeur du cinéma municipal.

Situé à quelques minutes à pied du centre-ville d’Écully, le centre culturel présentait deux films ce lundi 11 octobre dans le cadre du Festival Lumière. Photo : Yann Chérel Mariné

« On a des gens de l’extérieur qui viennent découvrir la salle, c’est gratifiant »

Le directeur du cinéma d’Écully est heureux : « C’est la première fois qu’on a deux séances, alors on profite ! On a pu choisir les films qu’on souhaitait, et poursuit, pour nous, le Festival c’est aussi l’occasion de travailler avec la métropole, on a des gens de l’extérieur qui viennent découvrir la salle, c’est gratifiant ». Marie-Pierre, originaire d’Écully, vante les mérites de sa salle qui « a toujours une programmation qui offre un plus ». Eux sont venus de bien plus loin : Roman, Artem, Vladislav, trois amis russes : « On a pris 38 billets en tout pour le Festival », expliquent les trois jeunes qui ont entre 20 et 24 ans. Le dernier a même fait le voyage de Russie pour l’occasion !

Le centre culturel d’Écully est à la fois une salle de cinéma et de spectacle, un espace d’exposition et de rencontres. Photo : Yann Chérel Mariné

La réalisatrice césarisée Delphine Gleize (Sale Battars, meilleur court-métrage en 2000) a fait le déplacement pour présenter un « film référence quand on est scénariste », souffle-t-elle devant les quelques spectateurs. « J’étais déjà venue ici en 2019, et aujourd’hui c’est un plaisir de vous présenter Sunset Boulevard». Elle salue enfin le « culot » du public : « Il y a plus de panache de venir voir un film en noir et blanc à 17 heures que le film avec le grand blond à 20 heures! ». Les spectateurs rigolent, et profitent de ce bref instant de partage.

Agnès Gardon-Chemain (à gauche), la première adjointe d’Écully, remerciait le Festival de l’opportunité “de travailler main dans la main entre les différentes collectivités”. Elle a ensuite donné son micro à la réalisatrice Delphine Gleize (à droite). Photo : Yann Chérel Mariné

« On va voir 19 films en tout »

Le lendemain, on avait le choix entre Corbas ou Bron pour voir un film de Jane Campion, la réalisatrice mis à l’honneur cette année. Dans la ville de l’extrême-sud-est c’était Un ange à ma table, réalisé en 1990 et qui a gagné de nombreux prix. On est finalement allé à Bron, au cinéma des Alizés, pour voir Sweetie, le premier long-métrage de la réalisatrice, sorti en 1989. À une heure de la séance, une bénévole de la semaine apporte 85 billets. La grande salle compte 210 places, une dizaine d’entrées sont vendues. Au début de la séance, seuls les premiers rangs sont vides. Ce jeudi, la salle de Bron accueillait à nouveau une projection, avec Maigret voit rouge de Gilles Grangier.

Au Cinéma Les Alizés, à Bron, avant la projection de Sweetie, de Jane Campion. Photo : Yann Chérel Mariné

Alors que la séance commence à 20h30, les premiers spectateurs arrivent à 19h30. Les deux employés du cinéma les accueillent : le premier contrôle leur passe sanitaire, le second vérifie qu’ils ont un billet. Il les oriente au fond du couloir, après la salle « Jacques Demy », direction la salle « Sandrine Bonnaire ».

Au premier rang de la file d’attente, Danièle et Bernard, sont venus du 8ème arrondissement de Lyon : « On va voir 19 films en tout, une moyenne de deux par jours ». Ils expliquent être des habitués de la salle, mais les cinéphiles ajoutent que le Festival « permet de voir encore d’autres films ». Au cinéma des Alizés de Bron, cela permet un brassage. Bruno, employé du cinéma, confirme : « Ça permet de faire venir des gens qui ne viennent pas à notre cinéma ! ». Isabelle et Annie, deux amies retraitées, venues de Meyzieu en covoiturant, ont également pris des places pour la séance du lendemain dans leur ville, « c’est pratique pour nous ! », sourient-elles.

Il est presque 20 heures, voilà Monique, bénévole retraitée chargée de l’accueil, qui accompagne les spectateurs dans la salle, après une longue journée : « J’étais à la Halle [Tony Garnier] toute la journée, j’habite pas très loin de Bron, donc je me suis proposé pour venir », explique-t-elle.

« Le plus du Festival, c’est bien de faire la présentation d’un film »

« Évidemment, quand il y a une salle Jacques Demy, je suis un peu chez moi », confie Rosalie Varda, la fille d’Agnès Varda (disparue en 2018) et belle-fille de Jacques Demy, compagnon d’Agnès Varda, et réalisateur des Parapluies de Cherbourg. Venir au Lumière, c’est partager un petit moment privilégié lors de la présentation d’une séance par une personnalité du cinéma.

« C’est vrai qu’on profite de la notoriété de nos invités, jeudi on aura Clovis Cornillac, un local de l’étape [il est né à Lyon, NDLR]. Bon, on n’a pas encore Karim [Benzema, natif de Bron, NDLR] qui s’intéresse au cinéma… », lâche Bruno, employé du cinéma, en souriant. Et poursuit : « Le plus du Festival, c’est bien de faire la présentation d’un film. Sweetie, je l’ai vu quand il est sorti en France, juste après Un ange à ma table, alors qu’il a été réalisé avant ».

Rosalie Varda a présenté Sweetie, le premier long-métrage de Jane Campion, Prix Lumière 2021, au cinéma Les Alizés, à Bron. Photo : Yann Chérel Mariné

« J’aime venir dans cette salle municipale, portée par une association et une autre programmation », pense tout haut Rosalie Varda devant une salle conquise. « J’ai arrêté d’être costumière il y a quinze ans quand j’ai repris Tamaris, et on se rend davantage compte de l’importance des salles. C’est la force du Festival Lumière, d’avoir créé un festival populaire qui donne l’envie aux gens de voir des films qu’on ne connait pas ». Une seule main se lève lorsqu’elle demande dans la salle qui a vu le film. « Ah mais c’est génial », s’exclame-t-elle. Les lumières s’éteignent, Sweetie apparait à l’écran.

Voilà bien l’ambition du Festival Lumière. Être un fête qui met en valeur les personnes et les lieux du cinéma autant que les œuvres. Pour Bruno, l’employé du cinéma de Bron, « le Festival, c’est un coup de projecteur, on vit aussi dans une phase creuse du cinéma. Ça donne aux l’envie de reprendre l’habitude d’aller au cinéma ».