Alors que le soleil se couche sur Fourvière, l’Ecornifleur vous embarque dans le monde de la nuit auprès des noctambules et travailleurs de l’ombre.
À la recherche d’un ciel étoilé, les amateurs du Club d’Astronomie Lyon Ampère se retrouvent une nuit par semaine dans leur observatoire, situé à 45 minutes de Lyon. Par mauvais temps, l’instant dédié à l’observation disparaît au profit d’un moment entre passionnés.
Loin de l’existence nocturne mouvementée des villes et de leur pollution lumineuse, l’observatoire du Club d’Astronomie Lyon Ampère (CALA) apparaît lorsqu’on arrive au bout du chemin homonyme, à quelques kilomètres du village de Saint-Jean-de-Bournay. C’est là qu’on trouve la vraie nuit, celle qu’il ne faut surtout pas déranger si l’on veut avoir la chance de l’observer. La règle veut donc que chaque conducteur arrivant sur les lieux éteigne les phares de sa voiture, évitant ainsi l’éblouissement des personnes déjà sur place et préservant leur vision nocturne. Un œil ébloui a besoin de plusieurs longues minutes pour se réadapter à l’obscurité, trop de temps perdu pour ceux qui ont tout un ciel à observer.
Ce vendredi soir, c’est phares allumés que Jean-Charles Ripault empreinte le Chemin de l’observatoire. Adhérent et membre du bureau du CALA, ce passionné d’astronomie sait que le brouillard et la pluie qui s’abat sur son pare-brise empêcheront toute observation. « Même quand il fait moche, on est toujours quelques-uns à se retrouver les vendredis soir », affirme-t-il. Dans le « lieu de vie », cabanon juxtaposant le bâtiment scientifique et ses télescopes, ils sont six ce soir-là autour d’une pizza, bavardant en espérant un meilleur temps pour les futures soirées d’observation. « Je suis venu pour voir les copains ! » lance Pascal Ayrault, un professeur de mathématiques membre du club.
Le plus grand club d’astronomie de France
En totalité, le CALA compte aujourd’hui 225 adhérents, ce qui fait de lui le plus grand club d’astronomie de France, sans compter la structure nationale AFA (Association Française d’Astronomie). Aux activités des adhérents s’ajoutent trois salariés, dont le rôle est d’intervenir pédagogiquement dans les écoles, les médiathèques ou les prisons pour promouvoir l’astronomie et les savoirs scientifiques.
« Lorsque les conditions sont bonnes, une trentaine d’amateurs peuvent se retrouver ici les vendredis soir » précise Jean-Charles Ripault. Pour lui, une des forces du club est la diversité des profils de ses adhérents : « On peut retrouver tous les niveaux et des pratiques de l’astronomie très différentes, explique-t-il. Certains sont spécialisés dans l’astrophoto, d’autres dans le dessin astronomique ou simplement dans l’observation. Il y en a même qui ont publié dans la revue scientifique Nature ! ».
« Spectrographie », « diviseur optique », « cercle d’imagerie »… Les discussions animées du soir laissent en dehors les néophytes. Damien Bouquier, un adhérent présent ce soir-là, explique avoir eu sa « première étoile » il y a deux semaines. Cette formation d’une journée ne lui a pas appris à dévaler les pistes de ski mais à démarrer de façon autonome l’observation de la voûte céleste. « Au club, on a vraiment la capacité de former les débutants à la pratique. Si tu débutes, tu peux commencer à avoir de belles images en 30 minutes ! » précise Jean-Charles Ripault.
« Une bonne école d’humilité »
Sous une des deux coupoles du bâtiment scientifique de l’observatoire, le lyonnais, chef de projet en informatique, détaille avec passion les différents usages et spécificités des télescopes. Baigné dans une lumière rouge, la seule qui permette de ne pas éblouir l’œil, l’ambiance est science-fictive. Il dit avoir toujours vécu « le nez en l’air ». Issu d’une formation scientifique, il rejoint le CALA pour recevoir la formation pratique proposée par le club : « Aujourd’hui, c’est moi qui suis en charge de cette formation » s’amuse-t-il. Pour lui, la pratique de l’astronomie « est une bonne école d’humilité », car « on se sent vite tout petit face à l’univers ».
De retour dans le cabanon, Jean-Charles Ripault sort sa tablette et expose fièrement ses plus belles photographies de l’espace. Là, sa passion prend alors une autre dimension. Des images époustouflantes de galaxies, d’amas d’étoiles et d’objets célestes en tout genre défilent sur l’écran. À la manière d’un chasseur d’étoile, il regroupe dans un tableau Excel ses prochaines proies cosmiques dont il espère tirer le portrait dans l’année, lorsque le temps sera plus clément. Si certaines nuits d’observation peuvent prendre fin au petit matin, lorsque le soleil chasse les dernières étoiles, les six camarades quittent le lieu vers 1h00, résignés sous ce ciel sans étoile.
Tom Sallembien