Rosalie, le second long-métrage de la réalisatrice Stéphanie di Giusto, sort en salle le 10 avril. L’Écornifleur a vu le film en avant-première au festival de cinéma queer Écrans Mixtes, en présence de l’équipe du film. Critique.
Rosalie, Stéphanie di Giusto mars 2024
Rosalie, Nadia Tereszkiewicz © Marie-Camille Orlando – 2023 TRESOR FILMS – GAUMONT – LDRPII – ARTÉMIS PRODUCTIONS

Librement inspiré de la vie de Clémentine Delait, née dans les Vosges en 1865 et atteinte d’hirsutisme (dérèglement hormonal causant une forte pilosité), Rosalie se tient pourtant loin de l’image des « femmes à barbe » et autres phénomènes des foires populaires. 

Dans la France de 1870, au moment de la révolution industrielle et au lendemain de la défaite de la guerre franco-prussienne, Rosalie épouse Abel, un homme endetté et plus âgé, surtout intéressé par sa dote. D’abord craintive et honteuse de sa condition qu’elle cache, Rosalie va rapidement s’affirmer, en portant sa barbe au grand jour, face à Abel qui se sent trahi après avoir découvert son secret. 

Sélectionné dans la catégorie « Un certain regard » au Festival de Cannes 2024, il s’agit de la deuxième réalisation de Stéphanie di Giusto. On y retrouve l’intérêt de la réalisatrice pour les femmes pas comme les autres. Son premier film, La Danseuse (2016) mettait en scène Loïe Fuller, danseuse pionnière de cabaret et amante d’Isadora Duncan. 

Image au top

Plus que les dialogues ou le scénario, c’est l’image qui capte l’attention du spectateur. La forêt, la rivière et la nature en général prennent des allures impressionnistes et semblent former un personnage du film à part entière. Ce personnage existe aussi grâce au travail réalisé sur le son entre « bruits de nature » et « bruits de chaire », comme l’explique la réalisatrice. Si la bande originale, réalisée par Hania Rani, est moins présente, elle frappe juste et souligne les émotions des personnages sans en faire trop.

Le regard posé par Abel sur Rosalie guide toute la première partie du film. Bien qu’elle arbore la plupart des codes de la « féminité » : cheveux piqués de fleurs, robes colorées agrémentées de volants, Abel refuse de la qualifier de femme après avoir découvert sa barbe. 

Scénario flop

La question du regard posé sur elle, et de son émancipation par rapport à ce regard est intéressante. Mais ce propos reste survolé, tant au détriment du personnage de Rosalie que de l’intention de raconter une histoire d’amour « malgré les différences » dixit la réalisatrice. Romance alors réduite à un enjeu : arrivera-t-il à lui faire l’amour la lumière allumée ? 

L’histoire d’amour tombe un peu à plat et on ressort frustré de ne pas avoir davantage découvert Rosalie. Et la fin ouverte, choix assumé de la réalisatrice, déçoit d’autant plus.  

Si le film n’est pas un coup de cœur pour L’Écornifleur, la performance des acteurs est à saluer, et plus particulièrement celle de Nadia Tereszkiewicz (Mon crime, Les Amandiers…) dans le rôle principal. 

Rosalie est à retrouver en salle dès le mercredi 10 avril 2024.