Le Festival Lumière 2022 met en valeur la cultissime actrice Jeanne Moreau dans sa facette moins connue de réalisatrice. Moi, jeune garçon, né à la fin des années 90, je ne connais pas bien Jeanne Moreau. Pour l’Ecornifleur, j’ai décidé de faire sa connaissance.
Jeanne Moreau et moi. Yeux dans les yeux. (Crédit: Solène Du Roy)
Pour moi, Jeanne Moreau c’est cette dame un peu âgée qui en 2008 était dans le fauteuil d’On n’est pas couché, une émission qui passait sur France 2 le samedi soir. J’avais 11 ans et 14 ans plus tard c’est toujours le seul souvenir d’elle que j’ai. À l’époque elle présentait la sortie d’un téléfilm. Pourtant deux choses m’ont marquées : premièrement, elle semblait être culte, ensuite, sa voix rauque et faite de basses était particulièrement agréable à mes oreilles.
En préparant la couverture du Festival Lumière avec la rédaction de L’Écornifleur, je me suis dit : “Ah marrant, ils mettent à l’honneur la dame qui passait sur l’émission de Ruquier”. Sans plus attendre, je propose un sujet. Parce que Jeanne Moreau est culte et que moi, digne membre de la GenZ, je ne la connais pas si bien.
L’avalanche commence à ce moment-là. Au restaurant universitaire, à la bibliothèque, en cours, dans la rue, ça ne s’arrête plus et sans cesse les tardifs des années 90 et ceux du début 2000 me demandent: “Mais c’est qui Jeanne Moreau déjà ?”
Reine des Césars
Le plus grand fait d’armes de Jeanne Moreau n’est pas d’être passée sur On n’est pas couché un soir de 2008. C’est une actrice. Du genre qui compte, vraiment. Pour l’aspect récompense, Jeanne Moreau c’est un César de la meilleure actrice en 1992 pour La vieille qui marchait dans la mer de Laurent Heynemann. Jamais je n’ai vu ce film, mon premier réflexe est de rechercher des images sur une plateforme de partage de vidéo. Un seul résultat probant, une bande-annonce en anglais qui ne fait que marquer l’évolution des techniques marketing.
Retour aux Césars, Jeanne Moreau a deux statuettes d’honneur. Personne n’a fait mieux qu’elle. Seuls Balasko, Godard et Douglas ont également reçu deux Césars honorifiques. Tarantino, Johansson, Stalone et De Funès, eux, sont dans les rétros.
Jeanne Moreau, côté carrière, c’est plus de 130 films, entre 1949 et 2013, et près de 60 pièces de théâtre. Sacrée carrière, dont je n’ai rien vu pour le moment…
“Elle est où Jeanne ?”
Parce qu’au final, Jeanne Moreau et moi, c’est un peu une histoire qui commence par un rendez-vous manqué. La faute à nos agendas sûrement. Elle est née en 1928, moi bien plus tard. Nous n’étions jamais au même endroit au même moment. Au final nous n’avons partagé que 20 années communes sur cette Terre, avant qu’elle ne disparaisse en 2017. Mais tout ça se rattrape.
Un copain qui aime bien Truffaut me dit : “Va voir Jules & Jim, elle joue dedans”. En bon jeune connecté, mon premier réflexe est d’aller sur une plateforme de VOD qui commence par “Net” et finit par “Flix”. Résultat de la recherche pour “Jules & Jim”: rien.
Flûte. Tant pis, pour Truffaut. Seconde recherche : “Jeanne Moreau”. Un seul résultat, un seul film où Jeanne Moreau joue est disponible sur la plateforme. Ce sera donc Le Procès d’Orson Welles, adaptation du roman éponyme de Kafka.
Deux heures de film, dix minutes de Jeanne. Certes, elle transperce l’écran dans son rôle de chanteuse de cabaret et voisine du personnage principal. Mais je n’en apprends pas beaucoup plus. Vient la question: “Jeanne Moreau me serait-elle inaccessible ?”
Actrice, réalisatrice, chanteuse
Jeanne Moreau a aussi été chanteuse. Sa voix suave qui m’avait frappé se retrouve sur quatre albums et de multiples collaborations. C’est ma piste pour la rencontrer. Son premier hit, J’ai la mémoire qui flanche, est dans la veine du répertoire français des années 60. Une voix ambiante qui pourrait aisément servir de transition sur des mix de DJ nouvelle génération. Dans ses singles, il y aussi India Song et Le tourbillon de la vie qu’elle chante pour accompagner les bandes originales de India Song de Duras et Jules & Jim de Truffaut.
Dans sa discographie, quelques pépites inestimables se cachent. Un dialogue avec Marguerite Duras sur de la Rumba, de la bossa Nova entraînante sur Les voyages, des mots posés sur du Satie, des duos avec Étienne Daho, un album complet sur des textes du poète Norge; tout ça fait partie de sa palette. Un régal pour les oreilles. Des sons parfaits pour accompagner les dimanches d’octobre du déjeuner au goûter.
Jeanne Moreau actrice, Jeanne Moreau chanteuse, il me reste à faire connaissance avec Jeanne Moreau réalisatrice. C’est cette dernière facette que met en valeur le Festival Lumière 2022. Ses trois films en version restaurée, Lumière, L’Adolescente et Lillian Gish sont présentés. Dernière séance et rendez-vous à ne pas manquer, vendredi 21h30, à l’Institut Lumière.
