Malgré une relance du secteur après les périodes de confinement, les cinémas accusent cette année une forte de baisse de fréquentation. Prix de la place, concurrence des plateformes de streaming ou désintérêt pour la programmation sont autant de raisons qui peuvent expliquer cette situation… en plein Festival Lumière l’Écornifleur est allé interroger les spectateurs lyonnais, aux abords du Pathé Bellecour.

Jeudi matin, rue de la République. La file d’attente du cinéma Pathé à Bellecour n’est pas bien longue, rien d’étonnant pour une matinée en pleine semaine. Sur la rue piétonne, on s’arrête par habitude pour regarder les films à l’affiche, sans pour autant pousser la porte d’entrée. En mai 2022, le Centre national du cinéma et de l’image animé (CNC) publiait une étude intitulée Pourquoi les français ne vont plus au cinéma ? et pointait tout une série de facteurs qui expliquent cette baisse de fréquentation. Les salles française accusent une baisse de fréquentation de 30% comparé à la situation d’avant Covid, en 2019. Toujours selon le CNC, le mois de septembre a connu le plus bas niveau de fréquentation depuis 1980 avec 7,38 millions d’entrées.
7 euros en moyenne pour une place
Alexandra, Mathilde et Salomé, élèves de premières en STD2A aux Écoles d’art Bellecour, sortent du cinéma, elles viennent d’acheter leurs places pour aller voir Smile ce soir, un film d’horreur réalisé par Parker Finn. « J’y vais une fois par mois, ou une fois tous les deux mois, parce que c’est cher », explique Alexandra en cherchant du regard l’approbation de ses deux amies. Même avec le tarif étudiant, les trois amies ont dû débourser 10,50 euros chacune. Selon l’étude réalisé par le CNC, le prix de la place est la deuxième raison pointée par les spectateurs pour expliquer la baisse de fréquentation (36% des sondés). « On a Netflix à la maison aussi », lance Mathilde avant qu’Alexandra ne lui réponde : « Mais ce n’est pas la même chose quand même ». La concurrence des plateformes de streaming est indéniable, c’est la première raison invoquée par les 15-34 ans quand on leur demande pourquoi ils ne se rendent plus dans les salles. Il faut dire qu’avec les tarifs en vigueur, l’abonnement mensuel (8,99 euros pour Netflix et Disney+) est plus rentable qu’une place de cinéma, qui coûte actuellement en moyenne 7 euros.
« Pour moi un film c’est en salle »
Florence, qui travaille dans le cinéma, sort tout juste d’une séance du festival Lumière, et à l’air plutôt ravie du film qu’elle vient de voir. On comprend pourquoi, c’est elle qui l’a restauré. « Moi c’est plutôt une crise de temps. (…) J’ai besoin d’un quota sommeil », dit-elle en riant pour expliquer pourquoi elle va moins au cinéma en ce moment. « Pour moi un film c’est en salle et ce n’est pas ailleurs », explique celle qui n’a pas de télévision à la maison. L’argument du prix, Florence trouve que cela n’est pas tellement valable puisque des abonnements existent et permettent d’aller voir des films tous les jours. Le CinéPass (Gaumont et Pathé) coûte par exemple 16,90 euros par mois les étudiants, et 17,90 euros pour les cinémas UGC. Elle reconnaît tout de même que cela peut être un frein, comme pour une famille nombreuse par exemple.
Une habitude perdue pendant le Covid
C’est la première raison qui ressort de l’étude du CNC, les périodes de confinement ont modifié les habitudes du spectateur. « Depuis le confinement, on a pris l’habitude d’avoir le restaurant à la maison, les courses à la maison, et le cinéma à la maison. Du coup on ne sort plus », abonde Pauline, professeure de photographie. En pleine sortie pratique avec ses étudiants, elle explique qu’il faut attirer de nouveau le spectateur vers « l’expérience cinéma ».
« La programmation baisse en qualité »
« Je suis désespéré, quand je vais voir des films on est cinq dans la salle ! », explique Daniel, 80 ans, qui regrette que les bons films ne soient pas suffisamment mis en avant, et souvent diffusés à horaires… de retraités. Ce qu’il aime, lui, c’est le cinéma français. « Je vais au moins voir trois films par semaines ! L’hiver, pas l’été », s’exclame-t-il. Ce retraité de 80 ans est un spectateur fidèle, grâce à son abonnement il ne rate presque aucun film. Si le public français délaisse surtout les salles en raison du prix et de l’alternative streaming, la qualité des films à l’affiche est aussi pointée du doigt chez 23% des spectateurs interrogés par le CNC. « Pour moi c’est lié à la programmation, elle baisse en qualité », tranche Daniel en expliquant que la plupart des grandes sorties du moment ne l’intéressent pas.