À la rencontre des Français (9/10) : À moins d’un mois de l’élection présidentielle 2022, les dix journalistes de la rédaction de l’Écornifleur sont partis en reportage à la rencontre des Français pour sonder leurs attentes : entre espoirs et désillusions.
Le XV du Bouchon, club lyonnais de rugby, a lancé une section mixte de rugby à V en 2019. L’Écornifleur s’est invité à l’un des entraînements, le mercredi 26 janvier 2022.

Un soir de semaine, un peu avant 20 heures, une vingtaine de joueuses et de joueurs de la section mixte du club de rugby lyonnais le XV du Bouchon arrivent au stade Edgar Quinet, dans le 6ème arrondissement. Après un rapide passage aux vestiaires, l’entraînement peut commencer dans un froid glacial. Sur une moitié de terrain, les joueurs pratiquent le rugby à toucher, c’est-à-dire sans plaquage ou mêlée, dans la bonne humeur. Le développement de cette discipline s’inscrit dans le cadre de la stratégie nationale sport-santé impulsée par le ministère des Sports, qui cherche à toucher des publics qui ne se seraient pas dirigés vers le rugby autrement.
« Je regarde des matchs depuis que j’ai sept ans, mais je n’avais jamais participé avant », explique Mathilde, quasi trentenaire, qui travaille dans le secteur pharmaceutique. La jeune femme aux mèches blondes pratique le rugby mixte à toucher depuis fin mai 2021 : « Dès le début, je me suis vraiment bien entendu avec tout le monde, détaille-t-elle. J’avais l’impression de faire partie de l’équipe depuis des années ». Même son de cloche du côté de Margot : « Au début, tu as un peu peur de l’ambiance d’un club de rugby, s’amuse la jeune médecin esthétique. En réalité, il y a une très bonne ambiance et même un rapport un peu fraternel avec les garçons ».
“Si l’un d’entre nous galère, on s’entraide“
Margot explique qu’une copine à elle qui pratiquait le rugby à toucher depuis deux-trois ans l’a convaincue de commencer à son tour. « Elle me disait qu’il n’y avait pas assez de filles », précise-t-elle. Les filles représentent désormais quasiment la moitié des effectifs de la section mixte du club. La médecin esthétique se remémore avec le sourire la suite du discours de son amie : « C’est trop bien, ce n’est pas dangereux, tu n’es pas plaquée. » Mathilde, joueuse du mixte qui fait également partie de l’encadrement, confirme qu’il faut « faire attention » aux « différences de gabarit, de puissance et de force, surtout avec les garçons qui font du rugby masculin plaqué à XV à côté. » Elle insiste néanmoins sur l’absence de différences entre filles et garçons. Des propos confirmés par Santiago, un autre membre du staff : « On essaie de faire en sorte que les filles défendent sur les filles mais ce n’est pas la priorité, précise-t-il. On fonctionne essentiellement par zones ». L’entraîneur de l’équipe féminine de rugby du club, Fabien, confirme : « Ce qu’on voit à la télévision et la réalité, ce sont deux choses différentes ». « Mathilde fait 50kg à tout casser et pourtant elle n’hésite pas à se lancer sur des gars qui font 80-90kg », sourit-il en regardant les joueurs s’entraîner sur le terrain.
Le sentiment est partagé par Baptiste, étudiant ingénieur en stage pour six mois à Lyon. Ce Toulousain d’origine pratique depuis longtemps le rugby masculin plaqué à XV. « Quand je suis arrivé à Lyon, j’ai commencé dans la section masculine à XV mais il n’y avait qu’un entraînement par semaine, relate-t-il. J’avais besoin de me défouler davantage, donc j’ai essayé le rugby mixte et je me suis régalé ». Il confesse que la section mixte est « plus soudée » que la section masculine : « Tout le monde est bienveillant, apprécie-t-il. Il y a des joueurs de tous les niveaux, si l’un d’entre nous galère, on s’entraide ».
“Si on parle de politique, on tourne tout sur le ton de l’humour“
Les membres de la section mixte soulignent tous la diversité des profils, les entraînements étant accessibles à tous à partir de la majorité. « Il y a des gens de tout âge, le plus vieux a 44 ans, relate Margot. Ça rassemble toutes les professions, ça permet de rencontrer des gens auxquels on n’aurait pas été amené à parler ». La sociabilité tissée sur le terrain se poursuit également en dehors. « On va souvent boire des verres le mercredi soir après l’entraînement », glisse la médecin.
La clé de cette bonne entente tient peut-être à la volonté de chacun d’éviter les sujets qui fâchent. « On ne parle pas que de rugby, on peut parler des sujets sensibles mais chacun fait en sorte que ça ne crée pas de tensions, fait valoir Mathilde. Si on parle de politique, on tourne tout sur le ton de l’humour ». La joueuse estime que la politique pourrait compromettre « la bonne entente » entre les membres du club. Ce n’est pas Baptiste qui va dire le contraire : « Toute la journée, on entend tellement parler de politique, même sur ton téléphone tu ne vois que ça, lâche l’étudiant ingénieur. Sortir un peu de ça, ça fait du bien ».
Et pour la présidentielle 2022 ? Mathilde : « Je n’en sais rien, de base je suis plutôt entre la droite et le centre. J’ai voté Macron en 2017, je suis partagée sur son bilan. Je ne serai pas mécontente si une femme arrive à l’Élysée, mais ce n’est pas pour ça que j’irai voter Pécresse si son projet m’intéresse moins que Macron ». Margot : « J’ai voté Macron aux deux tours en 2017, je pense que je vais voter la même chose ». Baptiste : « J’ai toujours été de gauche, mais ça fait un moment que je ne m’y retrouve plus et que je me suis désintéressé de la politique. J’essaierai de ne pas faire un vote dans le vent ». |